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Accords Maroc-UE : Ce que l'on retient de l'arrêt du tribunal européen

Une annulation qui n'a pas d'effet immédiat. Un pourvoi en perspective. L'arrêt n'exclut pas l'application des accords agricole et de pêche au Sahara. Face à une énième manœuvre judiciaire du Polisario, le Maroc et l'UE réaffirment leur partenariat stratégique.

Accords Maroc-UE : Ce que l'on retient de l'arrêt du tribunal européen

Le 1 octobre 2021 à 11h55

Modifié le 4 octobre 2024 à 16h54

Une annulation qui n'a pas d'effet immédiat. Un pourvoi en perspective. L'arrêt n'exclut pas l'application des accords agricole et de pêche au Sahara. Face à une énième manœuvre judiciaire du Polisario, le Maroc et l'UE réaffirment leur partenariat stratégique.

Le tribunal de l'UE a annulé, mercredi 29 septembre, des décisions du Conseil européen, modifiant des accords de partenariat entre le Maroc et l’UE. Que dit cet arrêt ? Quelles sont sa portée et ses effets ? Quelle suite à cette affaire ? Médias24 fait le tour de la question.

Ce qui a été annulé

Le tribunal a annulé deux décisions émanant du Conseil de l’UE. Les deux concernent des accords de partenariat avec le Maroc :

  • Datée du 28 janvier 2019, la première décision modifiait l’accord euro-méditerranéen, établissant une association entre les communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et le Royaume du Maroc d’autre part.
  • Datée du 4 mars 2019, la deuxième modifiait l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable avec le Maroc.

Les décisions attaquées avaient donc, chacune, modifié des accords antérieurs, de manière à y inclure expressément les produits originaires du Sahara pour le premier et à y mentionner les eaux adjacentes à ce territoire pour le deuxième. Ce sont ces modifications qui sont en jeu, pas les accords en eux-mêmes.

Qui prend part au contentieux ?

Le litige oppose le polisario, à l’origine de la requête, au Conseil de l’Union européenne, qui a signé l’accord avec le Maroc.

Outre les parties principales (polisario et Conseil de l’UE), la procédure a connu la participation de la  France, la Commission européenne et la Confédération marocaine de l’Agriculture et du développement rural (Comader). Ce sont des « parties intervenantes ». Elles soutiennent la position du Conseil de l’UE qui a plaidé pour le rejet du recours introduit par le polisario.

Les parties défenderesse ou intervenantes contestent la recevabilité du recours du "polisario", considérant qu’il n’a ni la légitimité ni la représentativité pour attaquer les accords Maroc-UE. Elles défendent aussi la légalité des Accords Maroc-UE.

Bien que concerné par ses effets, l’État marocain n’a pas pris part au contentieux.

Pourquoi les décisions ont-elles été annulées ?

Les actes des institutions de l’UE sont annulés lorsqu’ils sont contraires au droit régissant cette communauté. L’annulation n’a pas forcément de vocation punitive. Elle est plutôt corrective. Elle oriente l’institution concernée sur un éventuel vide juridique auquel elle doit remédier une fois l’acte annulé.

Dans cette affaire, le point litigieux tient à l’applicabilité des accords au Sahara. Sur le fond, le tribunal n’écarte pas l’hypothèse d’un accord applicable à ce territoire. En effet, cette possibilité n’est pas exclue par le droit international sous réserve de recueillir, au préalable, « le consentement » de la population. La juridiction européenne considère celle-ci comme « tiers aux accords litigieux ».

« Lorsqu’une règle de droit international exige le consentement d’une partie ou d’un tiers, l’expression de ce consentement conditionne la validité de l’acte pour lequel il est requis », estime le Tribunal. On invoque ici le « principe de l’effet relatif des traités », qui n’aurait pas été respecté par le Conseil de l’UE.

En gros, le tribunal a surtout remis en cause les conditions de consultation des populations des régions du sud et non la possibilité d'appliquer les accords dans ces mêmes régions.

L’annulation n’a pas d’effet immédiat

L’arrêt n’a pas d’effet immédiat. Il annule les décisions attaquées, mais maintient provisoirement son application. Pour combien de temps ? Le Tribunal émet deux hypothèses : Si aucun pourvoi n’est introduit dans les deux mois suivant la notification de l’arrêt, l’annulation deviendra définitive à l’expiration de ce délai. Si le recours est formé, l’annulation ne produira ses effets que lorsque la Cour se sera prononcée. Et sous réserve qu’elle confirme l’arrêt attaqué.

Cette suspension n’était pas acquise. En principe, les pourvois devant la Cour de justice de l’UE ne sont pas suspensifs. Mais il est possible d’y déroger si le tribunal décide de maintenir les effets de la décision attaquée. En l’occurrence, le tribunal a pris cette décision pour des motifs de « sécurité juridique ».

Le tribunal a ainsi relevé « que l’annulation de la décision attaquée avec effet immédiat » serait « susceptible d’avoir des conséquences graves sur l’action extérieure de l’Union et de remettre en cause la sécurité juridique des engagements internationaux auxquels elle a consenti et qui lient les institutions et les États membres ».

Le traitement du dernier pourvoi, dans une affaire similaire, avait duré près de 10 mois. La Cour avait statué sur le pourvoi initié par le Conseil contre un arrêt du tribunal qui donnait gain de cause au polisario.

Tout en annulant cet arrêt, la Cour avait, à l’époque, rejugé le dossier en déclarant « irrecevable » le recours en annulation, introduit par le polisario, contre une partie de l’accord d’association Maroc-UE. L’affaire concernait là aussi la contestation du champ d’application territorial de l’accord et son extension au Sahara.

Détail important : A la demande du Conseil, cette affaire avait été jugée selon une « procédure accélérée ».

Qui peut se pourvoir devant la Cour ?

Le pourvoi devant la Cour « peut être formé par toute partie ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions ». Dans l’affaire en question, cette règle s’applique au  Conseil de l’UE qui, conséquence de sa défaite en première instance,  a été « condamné à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par le Front Polisario ».

La partie perdante (en l'occurrence, le Conseil de l'Union européenne) a deux mois pour contester l'arrêt du Tribunal devant la Cour de justice (pourvoi).

« Comme le Maroc n'a pas participé à la procédure devant le Tribunal, il ne peut pas introduire de pourvoi devant la Cour et n'a donc pas de voie de recours contre l'arrêt du Tribunal », nous explique un juriste depuis Bruxelles, souhaitant garder l’anonymat.

Les parties intervenantes autres que les États membres et les institutions de l'Union ne peuvent former ce pourvoi, que lorsque la décision du Tribunal les affecte directement.

La portée de l’annulation

Si l’annulation est confirmée en dernier ressort, l'accord sera annulé, uniquement, en ce qui concerne son application pour le Sahara. Cela correspond aux modifications introduites par les décisions litigieuses. Il s'ensuit que l'accord restera en vigueur entre le Maroc (hors Sahara) et l'Union.

Comme cité plus haut, le tribunal ne s’oppose pas à l’application des accords au Sahara. Il conditionne cette application au consentement des populations concernées. Un point auquel les parties cocontractantes peuvent remédier et ce, toujours, dans l’hypothèse où l’annulation est maintenue suite au pourvoi.

Réaction sereine du Maroc et de l’UE

Le Maroc et l’UE accueillent avec sérénité l’arrêt concerné. Dans une déclaration conjointe, le Haut représentant/Vice-President Borrell et du Ministre des Affaires étrangères et Nasser Bourita, on promet des « mesures nécessaires afin d’assurer le cadre juridique qui garantisse la poursuite et la stabilité des relations commerciales entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc ».

Le message est clair : La stabilité et la pérennité des accords n'est pas remise en question. Les échanges dans le secteur de l’agriculture et de la pêche constituent un volet important du Partenariat global entre le Maroc et l’UE.

Au Royaume, cet événement est surtout perçu comme une énième "manœuvre judiciaire" du  polisario et de l’Algérie.

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